👊Cryptos pour tou.te.s, les premiers pas

N°7💸: finance responsable, mères exploitées et crowdfunding.

mars 23, 2022

✍️ Les hommes, les femmes, les cryptos et moi…

🐷 Je n’ai pas découvert les cryptos l’an dernier… La 1ère fois que j’ai travaillé sur le sujet, c’était en 2014 lors d’une enquête pour Streetpress. Dans la cave du Dernier bar avant la fin du monde, repaire de geeks au centre de Paris, j’ai écouté des aficionados du Bitcoin flanqués de T-shirts à logos, mon carnet de notes en mains. Des passionnés de tech doublés de libertariens se mélangeaient à des entrepreneurs ou avocats en costume Armani, des lobbyistes pour la reconnaissance légale des cryptos. Les premiers sentaient l’odeur des systèmes de refroidissement d’ordinateurs qui tournent sans cesse pour miner des bitcoins. Ils m’ont expliqué l’intérêt de ces diamants numériques : l’avantage d’une monnaie alternative, son potentiel spéculatif, le potentiel de la technologie derrière.

Pourtant, je n’ai pas acheté de bitcoin, ça me semblait une montagne impossible à gravir. A l’époque, il y avait peu de plateformes de trading, on entendait parler de piratage toutes les semaines, il fallait garder ses “coins” sur une clef privée au code unique, il n’était pas rare que ces codes soient perdus. Bref, trop risqué pour moi qui réservais mes économies à un achat immobilier... J’aurais dû pourtant. A l’époque, un Bitcoin valait 600 dollars… Cette semaine, en période de vaches maigres, il dépasse à nouveau les 40 000. LOL. Mon pote P., un mec, un développeur ingénieux, était convaincu par cette technologie. Il a investi au fur-et-mesure des années, 20 000 € en tout. Aujourd’hui, son portefeuille en bitcoins et ethers* dépasse les 200 000 €. Respect.

Dans la cave du bar, les cheveux en bataille, Eric Larchevêque descendait une pinte de blonde. L’entrepreneur venait d’ouvrir une Maison du Bitcoin dans le Sentier, un projet farfelu pour la visibilité devenu la sérieuse Coinhouse, une plateforme d’achat de cryptos qui a levé 15 millions d’euros en janvier 2022. Depuis, Eric a fondé la licorne Ledger avant de jouer les jurys dans l’émission de TV Qui veut devenir mon associé ? Les cryptos ont, elles-aussi, fait du chemin.

🦊 Au bar, j’étais une des 2 seules femmes dans ce boys’ club option finance décentralisée. Prévenue, j’ai attendu 2021 avant d’investir. Freinée par mon aversion au risque, la peur de tout perdre. C’est le cas de nombreuses femmes, d’après les études d’économie comportementale. A la jonction entre la tech et la finance, ascendant ingénierie, les cryptos sont un bastion masculin dur à pénétrer. Résultat, les femmes investissent deux fois moins que les hommes dans les crypto-monnaies : 7% des Américaines contre 16% des hommes, d’après une étude d’août 2021 du média CNBC. Et toi, t’en penses quoi ?

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Guide cryptos, les 5 premiers pas

💸 1 – On mise une somme modeste

On calcule la somme que l’on est prêt.e à perdre. Investissement plus risqué que les autres, volatil, on peut gagner beaucoup d’argent à court ou à long terme en cryptos…on peut aussi tout perdre rapidement. Comme tout investissement, il doit se penser sur plusieurs années, au moins 3 ans. A l’inverse, fuyez les montages russes du “day trading” ! On commence avec quelques centaines d’euros et on rajoute 100 euros tous les 1er du mois. Car un investissement régulier permet de prendre moins de risques : en achetant parfois haut, parfois bas, cela correspond à une forme de moyenne. Cette somme-là, on est prête à la laisser fructifier plusieurs années. En cas de pépin, on n’en a pas besoin pour payer son loyer, les réparations de la voiture ou la crèche du petit dernier…

💸 2 – On file sur une néo-banque

Avant de faire ton 1er achat, on ouvre un compte sur une banque en ligne comme Boursorama, N26 ou Hello Bank, et on y verse le montant de son investissement. C’est à partir de ce compte qu’on passera ses virements. Car les banques traditionnelles ont un problème avec les cryptos ! La plupart d’entre elles bloquent les versements par mesure de précaution excessive, ou considèrent qu’un achat en cryptos est comme un retrait en espèce soumis à un plafond…même si ça n’a pas de sens. Etrangement, personne ne m’avait prévenue. Imaginez le flip le 1er jour voyant le cours du Bitcoin fluctuer heure par heure et mon virement ne pas passer, appeler mon banquier, qui a dû appeler son supérieur. Et moi, les yeux rivés sur la courbe, en stress…

💸 3 – On ouvre un compte chez un “broker” connu

Ces plateformes d’achat, d’échange ou de stockage de cryptos sont recommandées pour les débutant.e.s. On ouvre un compte avec une carte d’identité et un selfie. Avantages ? Nos petites coupures virtuelles sont sauvegardées ici, sécurisées. Parfait pour les petits montants. Tout est expliqué pas à pas sur le site, on peut surveiller ses investissements en un clin d’œil. Les infos sur les nouveaux projets et les cours sont plus fiables que sur les sites obscurs en ligne. Inconvénients ? Ce n’est pas suffisamment sécurisé pour les grosses sommes, il faudra ensuite privilégier une clef privée ou “cold wallet”. La commission sur chaque achat est importante et beaucoup de jeunes projets de cryptos n’y sont pas recensés. Mais les débutants n’en sont pas encore là.

🏦 Pour moi, les plateformes de trading les plus simples et pédagos pour les débutant.e.s sont Coinbase et Coinhouse. J’utilise les deux pour mes deniers personnels.

Coinbase : C’est une des plus grosses dans le monde, cotée en Bourse au Etats-Unis, elle respecte la réglementation à la lettre. Elle achète des cryptos en masse pour les revendre à ses clients.

Binance : C’est la plus grosse plateforme de trading au monde pour acheter et vendre plus de 130 “tokens” ou jetons. Elle a même créé son propre jeton le BNB dans lequel on peut investir pour soutenir son développement.

Coinhouse : Basée en France, elle rassure celles et ceux qui ont peur pour leur porte-monnaie numérique.

Bitpanda : C’est une plateforme autrichienne d’achat de crypto-monnaies, d’actions, de produits dérivés (sic !) ou de métaux précieux.

Paymium : C’est le pionnier français de l’échange de bitcoins. Ses commissions sont basses, mais il ne propose pas d’autres cryptos.

Lydia : L’appli de remboursement de petits montants entre copains propose aussi d’acheter des cryptos grâce à un partenariat avec Bitpanda.

Quantfury : On déconseille cette plateforme difficile d’utilisation dont le siège social est basé aux Bahamas. En cas de litige, on dépend du cadre légal local...

💸 4 – On laisse tomber ses petits calculs

Pas de bol, tu n’es pas devin, ni devineresse (nom féminin peu usité). On croit souvent que l’on peut calculer la chute et prédire le moment de la reprise grâce à nos connaissances. La plupart du temps, on se plante. J’ai décidé d’investir en Bitcoin début 2021, le cours de cette crypto était haut, j’ai attendu que le Bitcoin passe sous une barre pendant plusieurs mois. Début décembre, la baisse était nette, le cours au plus bas depuis des mois, je me suis lancée. Je me suis crue maligne*. Certaine de ne pas me faire coincer en achetant au haut de la vague… Problème, la chute a continué, et continué. La valeur de mes actifs a donc baissée, je garde mes cryptos bien au chaud et attend qu’elles remontent. Patiemment.

Pour suivre le cours, prenez garde à vos sources, faites confiance à vos applis, à CoinGecko en Français ou CoinMarketCap. Les premiers jours, on fixe ardemment son téléphone. On ressent une vive excitation quand ça monte, on s’inquiète quand ça redescend. On est fasciné.e. Pourtant, cette attention permanente est un mauvais réflexe. Car l’investissement, en bitcoins, ethers ou autres cryptos solides est un investissement. On veut éviter l’anxiété financière, le stress, alors le mieux est de ne regarder qu’une fois par semaine ou par mois. On préfèrera investir un peu tous les mois, plutôt que tout lâcher d’un coup.

* Tu crois pouvoir faire mieux ? Les traders professionnels aussi, pourtant nous avons tous tort. Comme dans Système 1 - Système 2, les deux systèmes de la pensée, la plupart des études d’économies comportementales montrent que les marchés financiers sont tellement imprévisibles que même les professionnels font rarement mieux que la moyenne des indices ou des robots qui suivent les cours. 🤣

💸 5 – On commence par une de ces 2 ?

On commence par la reine des cryptos, l’ancêtre, le Bitcoin. Cette monnaie virtuelle a été inventée en 2009 par le très discret Satoshi Nakamoto comme un moyen de contourner les banques traditionnelles qui avaient abusé pendant la crise et ont renfloué leurs caisses sur le dos des Etats. Pas joli, joli. C’est une sorte de monnaie virtuelle ou de crypto-actif qui s’échange de pair à pair. Elle permet maintenant d’acheter certains biens et joue le rôle de réserve de valeur quand l’économie est perturbée. Elle ne repose pas sur un tiers de confiance, un État, comme les vraies monnaies.

Le Bitcoin est un système décentralisé où chaque transaction est validée par les membres de la communauté grâce à des calculs réalisés par ordinateurs. On peut détenir ses bitcoins anonymement grâce à une clef, soit un ensemble de chiffres sans lien avec son identité. Plus on avance dans le temps, plus la communauté grossit, plus il est long et difficile de créer un bitcoin. Et le nombre total de bitcoins est fixé à l’avance à 21 millions. Cette rareté anticipée est à la fois sa force et sa limite. Elle permet de maintenir sa valeur, mais en fait aussi un support spéculatif, car la hausse du prix est inévitable. Les débutant.e.s en cryptos commencent par acheter du Bitcoin car elle semble plus familière. C’est une bonne porte d’entrée car le cours des autres cryptos suit sa traîne en cas de boom ou de chute.

Si le Bitcoin sert à accumuler du capital, la 2ème blockchain* la plus connue, l’Ethereum consiste à signer des contrats numériques et décentralisés appelés “smart contracts”. Ces programmes automatisent une action lorsque des conditions pré-requises et définies par le créateur du contrat, sont remplies. L’Ethereum dépasse donc de loin le monde de la finance et permet à deux parties de tenir parole sans possibilité humaine de se défausser. Ainsi sur cette blockchain, certains ont créé des marchés décentralisés, d’autres sauvegardent des données numériques sans passer par les GAFA. On peut investir dans ses jetons, les ethers, ou dans les jetons de plein de cryptos créées par dessus sa technologie de contrats intelligents.

Plus de 7000 crypto-actifs ont été créés dans le monde, des projets plus ou moins solides, des solutions utiles pour repenser la propriété…ou des arnaques pures et simples. (Nous y reviendrons dans un prochain n°).

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📌 Les 2 mots de l’éco

La « blockchain » : C’est la technologie sur laquelle reposent les crypto-monnaies. Elle permet un échange d’informations décentralisé. C’est un grand livre de comptes numérique, composé de blocs, dans lequel sont consignées toutes les transactions (leur date, leur montant, les signatures, etc). Ce registre est copié sur des millions d’ordinateurs, il est donc impossible de l’effacer ou le pirater.

Les « tokens » ou jetons : ce sont les unités de compte de cryptos que l’on achète. (Rien à avoir avec les « tokens » militants 😉). L’ether (ETH) est la crypto ou le jeton de l’Ethereum. Les bitcoins sont ceux du Bitcoin.

À picorer

🙋🏻‍♀️ La meuf de la semaine. De la pédagogie, de la gouaille et de la précision. 📖L’entrepreneuse Eva Sadoun, 31 ans, co-fondatrice de LITA.co et Rift, publie chez Actes Sud Une économie à nous, un essai court, percutant et accessible sur sa vision de la finance engagée . Elle y appelle à créer une autre voie économique qui bénéficie à tou.te.s et inclut (enfin!) les femmes.

“Le capitalisme actuel est centralisé, patriarcal et repose sur l’accumulation du capital comme une fin en soi plutôt que comme un outil. Dans les familles, les femmes héritent moins du capital. Les règles de l’investissement et de la finance ont été dessinées par des hommes bourgeois et élitistes. Celles et ceux qui ne correspondent pas à cette norme ne se retrouvent pas dans ces valeurs, celles de performance et de domination”, raconte-t-elle dans une interview Challenges.

Elle a grandi dans une famille politisée, son background mêle prépa, maths et école de commerce. Cela explique pourquoi elle ne se reconnaît pas dans l’anti-capitalisme, mais pense que l’entreprise peut être “levier de protection de l’environnement” sous conditions. LITA.co, sa plateforme d’investissement, finance des entreprises sociales, soit l’économie réelle, avec un rendement de 3% à 7%. Pas mal. Le panier moyen des investisseurs.ses (dont 33% de femmes!) est de 3 000€. Accessible.

🎧 Femmes et enfants d’abord. Depuis le début de la crise sanitaire, on voit des bouilles enfantines s’incruster dans les réunions en visio, des classes fermées et réouvertes… Cette situation a eu un impact fort sur les parents qui bossent, en particulier les femmes. J’y ai consacré un épisode du podcast Point de Suspension(s). Le risque est qu’elles sortent du marché du travail pour garder les enfants en bas âge ou réaliser le travail domestique. 👩‍👧‍👦 Les femmes télétravaillent dans des conditions moins bonnes, elles sont plus interrompues par les enfants. Rebelote, les secteurs économiques essentiels comme les caissières ou infirmières ont été les plus exposés, d’après cette enquête menée lors du 1er confinement par l’économiste Anne Boring, rattachée au laboratoire d’études de genre Présage (Sciences Po). Le pire problème concerne les parents isolés dans l'impossibilité de déléguer. Toujours les mêmes qui trinquent.

🚴🏽 Délivrés. Fin des livreurs auto-entrepreneurs aux conditions de travail pourries ? Les Deliveroo pourraient enfin être traités en salariés à partir du 19 avril, à l’issue du procès pénal français qui a montré de solides preuves des “liens de subordination” et consignes entre la plateforme de livraison de repas et ses livreurs à vélo. Deliveroo avait “tous les avantages de l’employeur sans les inconvénients”, d’après la procureure qui a requis 375 000 € d’amende et 2 ans de prison contre les ex-dirigeants français. Et roulez jeunesse !

🤑 Rends l’argent. “Mesdames, voici comment arrêter de perdre de l’argent tout au long de votre vie”, titre Marie-Claire en résumant les enjeux auxquels Plan Cash veut répondre. En France, 52% des femmes admettent avoir une culture financière insuffisante, d’après une étude OpinionWay d’octobre 2021. Quelles stratégies de compensations les femmes en couple devraient-elles mettre en place pour éviter une baisse de revenus drastique lors d’un divorce ou décès ? Quand on se dit “oui” devant l’autel, on ne pense pas à la fin de la lune de miel…bancaire.

⛽ Pompé.e.s. Un personne payée au SMIC doit aujourd’hui travailler 69 minutes pour se payer le carburant nécessaire pour parcourir 100 km, d’après Alternatives économiques. Heureusement, le litre de gazole est repassé sous la barre des 2 € cette semaine. C’est Total qui va être content d’empocher la subvention du gouvernement censée limiter la hausse du prix du carburant.

🍻 Beurre dans les épinards. Le pouvoir d'achat des ménages a progressé de 1,9 % l'an dernier, porté par la reprise économique, les baisses d'impôts et les aides versées en fin d'année par le gouvernement pour lutter contre l'inflation, selon l'Insee. M’enfin, avec une inflation à 7,9% en février aux Etats-Unis, après le déclenchement de la guerre en Ukraine, ça ne va pas durer longtemps. En France, la dernière estimation de l’Insee l’estime à 3,6%... 😱

🕵🏻‍♀️ Making of / 👙les dessous de Plan Cash

Journaliste économique et féministe depuis 11 ans, j’ai travaillé à Challenges, Libération et Nouvelles Ecoutes. Je donne des informations croisées, vérifiées, des témoignages et mon expérience. Cependant, je ne fais pas de conseil en investissement.

🙏🏻💰 Je suis toujours à la recherche du bon annonceur, ça prend du temps de rester fidèle à ses valeurs. Si vous voulez me donner un coup de pouce, vous pouvez financer les outils numériques nécessaires au bon financement de Plan Cash, soit 802 euros au total pour les 2 prochains mois (cela comprend les abonnements à Canva, Notion, Calendly, Internet et quelques jours de bureau en open space). Voici un lien pour donner sur Liberapay, avec le budget détaillé.

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